Epigénétique et Microbiologie Cellulaire / Hélène Bierne

Epigénétique et Microbiologie Cellulaire / Hélène Bierne

EPIMIC

Helene et Ale

Team Leader and Co-Leader : Hélène Bierne & Alessandro Pagliuso

AXE DE RECHERCHE ET PROJETS EN COURS

L'équipe EPIMIC s'intéresse à l'impact à long terme des bactéries pathogènes sur la santé. Nous étudions les bases moléculaires des infections bactériennes persistantes, ainsi que les conséquences épigénétiques de ces infections sur les cellules hôtes. Cette recherche vise à trouver de nouveaux traitements contre les infections récurrentes, et contre les empreintes bactériennes qui pourraient contribuer à la genèse de maladies chroniques et complexes, telles que le cancer et les maladies auto-immunes et métaboliques.
Notre modèle est la bactérie intracellulaire facultative Listeria monocytogenes, qui, comme les virus, a développé des mécanismes très sophistiqués pour déréguler et exploiter les voies de signalisation des cellules de mammifères. Il est à noter que plusieurs de ces voies de signalisation sont également impliquées dans la cancérogenèse et dans d'autres effets délétères sur la santé. Ainsi, à travers l'étude de Listeria, nous pouvons mettre en évidence la fonction de protéines humaines, dont la dérégulation pourrait conduire à diverses pathologies.

Persistance et état VBNC de Listeria dans des vacuoles intracellulaires

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La pathogénicité de L. monocytogenes est liée à la capacité de cette bactérie à envahir différents types de cellules, comme les cellules épithéliales de l'intestin, du foie, du cerveau et du placenta. Quand elle atteint le cytoplasme de ces cellules, Listeria prolifère et utilise la force de la polymérisation de l'actine pour se déplacer dans le cytosol et se propager aux cellules voisines. Cette phase permet à ce pathogène de se disséminer dans les tissus du corps. En utilisant un modèle expérimental in vitro d'infection à long terme de cellules épithéliales humaines, nous avons montré qu'après 2-3 jours d'infection dans les hépatocytes et les cellules placentaires, L. monocytogenes passe d'un mode de vie cytosolique actif à un mode de vie vacuolaire quiescent. Les bactéries cessent de produire ActA (la protéine qui déclenche la polymérisation de l'actine à la surface bactérienne) et les bactéries cytosoliques sont capturées dans des vacuoles lysosomiales ("Listeria-Containing Vacuoles", LisCVs). Les sous-populations de bactéries vacuolaires survivent sous une forme peu ou non-réplicative, et conservent la capacité de se réactiver et de se disséminer de nouveau. En l'absence d'ActA, les bactéries peuvent même parasiter les cellules hôtes dans un état viable mais non cultivable (VBNC), ce qui rend les Listeria indétectables sur des boîtes de gélose, classiquement utilisées en microbiologie clinique (Kortebi et al., 2017). Les cellules hôtes porteuses des Listeria VBNC pourraient ne pas être reconnues et détruites efficacement par les cellules immunitaires. En lien avec cette idée, nous avons récemment démontré que la phase de persistance vacuolaire dans les hépatocytes coïncidait avec l'inhibition transcriptionnelle de gènes codant pour les protéines de la phase aiguë, qui sont des effecteurs importants de l'immunité innée (Descoeudres et al., 2021).

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Ces résultats révèlent la capacité de L. monocytogenes à générer des formes intracellulaires persistantes, qui pourraient être portées de façon asymptomatique chez les humains ou les animaux (Bierne et al. 2018)(Lotoux et al.2022).

Épigénétique, infection et immunité

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Nous avons découvert que Listeria cible la protéine humaine BAHD1 et montré que BAHD1 définit un nouveau complexe répressif impliqué dans la régulation chromatinienne de l'expression des gènes (Bierne et al. 2009). Lors de la signalisation induite par l'infection par L. monocytogenes, le complexe BAHD1 réprime un ensemble de gènes d'immunité induits par les interférons (en particulier les interférons de type III ou IFN lambda) dans les cellules épithéliales. Lorsque les bactéries sécrètent la protéine LntA, ce facteur bactérien inhibe l'action de BAHD1 dans le noyau et active sélectivement les gènes stimulés par l'interféron (Lebreton et al. 2011). LntA interagit directement sur BAHD1 en se liant à un domaine de BAHD1 riche en proline. Deux lysines de LntA sont requises pour cette interaction spécifique et pour la fonction LntA (Lebreton et al. 2014).          

Ces résultats ont contribuer à montrer qu'une bactérie pathogène peut moduler l'expression des gènes de l'immunité, en contrôlant négativement ou positivement la fonction de régulateurs épigénétiques (Bierne et Hamon, 2022).

LntA est un paradigme pour une classe émergente des effecteurs bactériens qui entrent dans le noyau et qui détournent les processus nucléaires, appelés «nucléomodulines» (Bierne and Pourpre, 2020). L'étude des nucléomodulines peut générer de nouvelles pistes pour combattre les maladies infectieuses. Notre travail vise maintenant à caractériser les épimutations induites par ces facteurs et par d'autres stimuli bactériens, et à rechercher si ces "patho-épimutations" reprogramment les cellules hôtes.

Le facteur épigénétique BAHD1

 BAHD1 définit un nouveau complexe répressif impliqué dans la régulation épigénétique. BAHD1 s'associe à des régulateurs de la chromatine (MIER, HP1, MBD1, KAP1) et des enzymes modifiant la chromatine (HMTs et HDACs), formant un complexe multiprotéique qui induit la formation d'hétérochromatine (Bierne et al. 2009, Lebreton et al. 2011, Lakisic et al. 2016). La formation d'hétérochromatine médiée par BAHD1 est couplée à la méthylation de l'ADN et pourrait contribuer à l'architecture spatiale du génome (Libertini et al., 2015).

La déficience en BAHD1 chez la souris altère le développement placentaire et diminue le taux de cholestérol (Lakisic et al. 2016), et induit des phénotypes d'anxiété (Poupre et al. 2020). Elle impacte l'infection bactérienne par Listeria (Lebreton et al. 2011).

BAHD1 site web2020

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Fundings

Notre équipe est soutenue par l'INRAE, l'Agence Nationale de la Recherche (ANR), la Ligue de Recherche Contre le Cancer et la fondation iXcore pour la Recherche.

Contact

Hélène Bierne & Alessandro Pagliuso

INSTITUT MICALIS, INRAE, AgroParisTech, Université Paris Saclay
INRA-Bât 442, Domaine de Vilvert, 78350 Jouy-en-Josas, France
Tel : + 33 (1) 34 65 22 89
E-mail : helene.bierne@inrae.fr

alessandro.pagliuso@inrae.fr